Projet ADIPOPIEZO : Piezo1, expansion adipeuse et complications de l’obésité.
L'obésité, définit pratiquement par un indice de masse corporelle (poids/taille au carré) supérieur ou égal à 30, est la maladie chronique la plus répandue dans le monde. Elle touche environ 650 millions d'adultes selon les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Au cours des dernières décennies, sa prévalence a considérablement augmenté, atteignant des proportions pandémiques, avec près de 39 % des adultes en surpoids et 13 % d'obèses au niveau mondial. En France, le taux d'obésité est de 17 % en 2023 contre 8,5% en 1997. Chez les 18-24 ans, le chiffre a plus que quadruplé en 25 ans.
L’OMS définit l'obésité comme « une accumulation anormale ou excessive de tissu adipeux qui peut nuire à la santé ». Cette accumulation de tissu adipeux résulte d’un stockage important de graisse (lipides) dans ce tissu et est due à un déséquilibre entre les apports énergétiques (alimentation trop riche en graisse et en sucre) et la dépense énergétique (sédentarité, stress chronique, manque d’activité physique). Il est cependant important de bien comprendre que l'obésité n'est en aucun cas le résultat d'un manque de volonté mais est une maladie complexe multifactorielle qui affecte différents organes.
Cette accumulation pathologique de tissu adipeux chez les personnes souffrant d’obésité augmente le risque de développer de nombreuses maladies telles que les maladies cardiovasculaires, le syndrome métabolique, le diabète de type 2, les hépatopathies métaboliques (maladie du foie gras) et certains types de cancer. Cela non seulement contribue de manière importante à la morbidité et à la mortalité mondiales, mais impose également un fardeau économique considérable. L'obésité est également associée à un déclin physique plus rapide et devient donc un problème majeur pour nos populations occidentales vieillissantes.
Malgré les progrès récents des stratégies thérapeutiques ou chirurgicales (chirurgie bariatrique), la prise en charge de l'obésité et de ses complications reste très difficile et les résultats des interventions portant sur le régime alimentaire et l'activité physique sont généralement modestes à long terme. Il n'existe aucun traitement médicamenteux miracle et il est donc crucial de mieux comprendre les mécanismes tissulaires et cellulaires sous-jacent au développement de l’obésité et de ses complications afin de pouvoir identifier de nouvelles cibles thérapeutiques.
Il existe chez l’homme et la plupart des espèces deux grand type de tissu adipeux. Les tissus adipeux blancs composé d’adipocytes blancs qui stockent les lipides et qui sécrètent de nombreuses hormones et les tissus adipeux brun et beiges composés d’adipocytes bruns et beiges qui sont thermogéniques, c’est-à-dire qu’ils sont capables de dissiper de l'énergie sous forme de chaleur en brûlant l’excès de calories.
Durant ses dernières années, de nombreuses études ont montré que les tissus adipeux blancs qui s’accumulent de manière excessive lors de l’obésité deviennent dysfonctionnels et que ces dysfonctions contribuent au développement des maladies associées à l’obésité. A l’inverse le nombre d’adipocytes brun et beige est diminué lors de l’obésité et leur fonction est aussi altérée. Leur réactivation ou une augmentation de leur masse pourrait donc permettre de réduire l’accumulation des tissus adipeux blanc et ainsi contrecarrer l’obésité et ses complications. II est donc crucial de mieux comprendre les mécanismes à l’origine des changements de ces tissus chez les personnes souffrant d’obésité.
C'est dans cette problématique que s’inscrit le projet ADIPOPIEZO qui regroupe trois équipes de recherche de l’Université Côte d’Azur avec pour objectif d’identifier de nouvelles protéines qui contrôlent la fonction des adipocytes blancs et des adipocytes thermogéniques bruns et beiges et d’étudier leurs éventuelles anomalies chez les personnes souffrant d’obésité.
Des études récentes ont montré que les adipocytes blancs et les adipocytes thermogéniques bruns et beiges étaient des cellules mécanosensibles, c’est-à-dire que leur activité et leur fonction peuvent être influencées par les forces que subissent ces cellules dans l’organisme. Cela suggérait que des protéines capables de détecter ces forces mécaniques peuvent être de nouveaux régulateurs de la fonction de ces cellules. En partant de cette hypothèse, nous avons montré que les adipocytes blancs et les adipocytes thermogéniques expriment en grande quantité une protéine mécanosensible appelée Piezo1. Piezo1 est un canal ionique qui en réponse à des forces mécaniques va s’ouvrir permettant de faire entrer dans ces cellules des ions en particulier du calcium qui est important pour différents processus biologiques.
Les équipes du projet ADIPOPIEZO en association avec une équipe de recherche en Allemagne ont montré que le canal Piezo1 dans les adipocytes est indispensable pour limiter l’augmentation excessive de taille des adipocytes lors de l’obésité et ainsi limiter leur dysfonction. Activer pharmacologiquement ce canal dans ces cellules pourrait donc permettre de limiter la dysfonction des tissus adipeux lors de l’obésité et de lutter ainsi contre le développement des complications de l’obésité.
Quant à la fonction du canal Piezo dans les adipocytes bruns, elle n'est pas encore clairement définie. Il reste en particulier à déterminer si son activation favorise ou au contraire réprime la fonction thermogénique de ces cellules et en conséquence favorise ou diminue la capacité de ces cellules à brûler les calories excédentaires. Pour répondre à cette question, les équipes de recherche du projet ADIPOPIEZO étudient des adipocytes bruns ou beiges dans lesquelles cette protéine est soit activée soit bloquée.
L’objectif final de ce projet est de mieux comprendre le rôle de cette protéine mécanosensible dans les adipocytes et de déterminer si la modulation de son activité pourrait être à l’avenir une nouvelle solution thérapeutique médicamenteuse contre l’obésité.
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Découvrez le portrait de Jean-François Tanti à l'origine du projet ADIPOPIEZO !
Nouvel épisode du podcast INTERVALLE : Mieux comprendre l'obésité
Sortie du 5ème épisode du podcast INTERVALLE !
L'obésité est-elle une maladie ? À partir de quand une personne peut-elle être considérée comme obèse ? Combien de personnes sont-elles concernées dans le monde ? Quels sont les mécanismes cellulaires et tissulaires qui rentrent en jeu dans le développement de l'obésité ?
Pour répondre à ces questions nous avons reçu Jean-François TANTI, chercheur CNRS au Centre Méditerranéen de Médecine Moléculaire (Université Côte d'Azur, INSERM), Eric HONORE, chercheur CNRS à l’Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire (Université Côte d'Azur, CNRS, INSERM), et Ez-Zoubir Amri, chercheur CNRS à l’Institut de Biologie Valrose (Université Côte d'Azur, CNRS, INSERM).
INTERVALLE est un podcast produit par le service Science et Société d'Université Côte d'Azur et disponible sur toutes les plateformes d'écoute. Ce podcast est à la portée de tous les curieux qui ont soif de découvertes ! A chaque épisode, une chercheuse ou un chercheur d'Université Côte d'Azur vous accompagne dans un voyage unique au cœur de ses travaux de recherche !